CANCER, LA SENSATION DE VIDE APRÈS L’ARRÊT DES SOINS… LA SOPHROLOGIE, UNE ALLIÉE DE CHOIX !
De l’annonce parfois brutale, en passant par les batteries d’examens, puis les traitements lourds avec tous les rendez-vous programmés, ces hauts et ces bas tant physiquement que moralement, les effets secondaires difficiles à vivre, à soulager et épuisants : nausées, vomissements, maux de ventre, douleurs musculaires, diarrhées ou constipation, aphtes, la perte des cheveux et de toute pilosité, perte de sensibilité dans les extrémités, cicatrices douloureuses, image de soi modifiée, fatigue intense, etc… le corps, le mental et les émotions sont soumis à rude épreuve.
Et après ?
Celles et ceux qui sont passés par l’épreuve du cancer, auront peut-être aussi vécu ce moment si particulier de l’annonce de la fin de l’épreuve : « Vous êtes en rémission, vos traitements sont finis. Rendez-vous dans 6 mois pour un scanner de contrôle, pour une fois, je ne vous dis pas à bientôt ! ». On repart alors le sourire aux lèvres en osant à peine y croire, on appelle l’entourage pour annoncer la bonne nouvelle !
Yes ! Plus d’opérations et/ou de traitements, de séances de chimiothérapie, de radiothérapie, de curiethérapie et tous leurs effets secondaires inconfortables, douloureux et épuisants ! Plus de rendez-vous pour des examens parfois penibles, où l’épée de Damoclès se balance au dessus de la tête jusqu’à l’annonce du résultat. ouf ! cette fois-ci, ça passe !… Que d’émotions… Reste encore quelques désagréments récurrents et variables d’un individu à l’autre et parfois très handicapants : acouphènes dûs à la toxicité de la chimiothérapie, douleurs musculaires ou cicatricielles, mobilité réduite, neuropathies fonctionnelles dans les extrémités, fatigue chronique, insomnies, difficultés de concentration, perte de mémoire immédiate où l’on finit par se résoudre à tout noter et à prendre des actions chez Post-it !
Les humeurs changeantes aussi, en fonction de son état du jour, avec des émotions faites de hauts et de bas, de peurs… nous pourrions presque dire que finalement, ce n’est pas grand chose comparé aux épreuves passées… N’empêche que ces montagnes russes ne sont pas confortables et finissent par affecter notre moral et notre énergie.
Le corps a vécu un tsunami…
Comment retrouver un équilibre avec cette nouvelle réalité objective ?
Il reste épuisé de toutes ces batailles menées par le guerrier que nous avons été et sommes encore malgré le genou à terre, et que nous avons peine à quitter… La tête voudrait vite passer à autre chose et le corps a du mal à raccrocher les wagons… Le mental essaye de prendre le contrôle en faisant des projets : « il n’y a plus de temps à perdre, nous n’avons qu’une vie ». Nous avons envie et besoin de revenir vite dans l’action, que notre vie reprenne son cours « normal » avec les activités et la même énergie d’avant, qui sont restées ancrées en mémoire. Mais le corps nous rappelle vite à l’ordre… Lui n’est pas prêt et peut-être même qu’il n’en n’a plus la capacité. Il y a alors un déséquilibre qui s’installe entre nos besoins, nos envies et nos capacités réduites (temporairement ou durablement), et dont nous mettons parfois un peu de temps à prendre conscience pour enfin en tenir compte et agir en conséquence.
Les jours passent, la vie reprend peu à peu son cours, et nous nous retrouvons seul(e) face à soi-même, à nos ressentis. Un jour ça va, un autre moins, sans raison particulière. Une douleur musculaire par ci, un mal de tête ou de ventre par là, une angoisse ou une fatigue intense qui persiste, et plus de rendez-vous chaque semaine avec nos référents médicaux pour nous rassurer rapidement…
« Je ne vais pas les appeler et les déranger juste pour ça quand même… en plus, ça risque d’affoler mes proches… J’attends un peu de voir si ça passe avant d’en parler ou de consulter ».
Il faut bien avouer qu’encore trop souvent malheureusement, le corps médical est centré sur la pathologie, l’organe malade et le traitement, en oubliant d’aborder le patient dans sa globalité (corps, mental, émotions). Il n’est donc pas rare de constater lors d’annonces de résultats, qu’il y a encore un gap entre la perception du patient et la mesure du soignant. De plus, la problématique de la rémission (nouvel état de santé, fragilité psychologique et leurs conséquences sociales / familiales), n’est que très rarement abordée et accompagnée !
Pour l’entourage proche ou les amis, c’est un peu pareil. Après l’annonce de la rémission, hop ! le cancer, c’est fini ! Envolé ! on passe à autre chose, c’est reparti, on efface tout et on recommence comme avant ! Si seulement… Pour nous, d’autres choses se jouent : sentiment de solitude, de décalage entre l’inconfort encore très présent, la fatigue, l’état de malaise persistant et souvent l’incompréhension et/ou déni de l’entourage (qui a aussi souffert de nous voir ainsi, en ayant du mal à trouver sa place), et qui voudrait vite tourner la page.
Ces symptômes, passagers et anodins pour les personnes en bonne santé, prennent pour nous une autre dimension. Ils viennent désormais sonner comme une alarme qui déclenche souvent un stress par peur de l’inconnu et de la rechute… nous pouvons alors nous sentir désorienté, paniqué, comme vide et sans repère, en incapacité de savoir comment réagir… L’anxiété et le stress peuvent alors s’installer insidieusement ou s’amplifier, dans la continuité des états vécus depuis le début de l’annonce de la maladie.
S’écouter enfin…
Se présente alors cette nouvelle réalité impermanente mais néanmoins objective que nous avons besoin d’accueillir et s’approprier. Un nouveau schéma corporel à intégrer, un nouveau rythme imposé par des capacités physiques encore réduites, peut-être un changement de vie personnel ou professionnel qui nous apparaît maintenant comme vital. Cela peut prendre du temps avant d’en arriver là, et peut même passer par une dépression souvent passagère, dite réactionnelle, comme un contre coup de toute l’énergie qui a été mise dans la bataille pour sauver sa vie, et maintenant derrière nous.
Mais alors, comment gérer ces nouveaux états et rétablir l’harmonie et l’équilibre entre notre corps, notre mental et nos émotions ? Comment ne pas s’identifier à sa maladie ? Comment avancer sur ce chemin escarpé, bouleversé et bouleversant de la vie, qui peut malgré tout nous permettre d’écouter nos besoins essentiels, nos envies, nos valeurs profondes, et plus seulement à foncer tête baissée sur l’autoroute des habitudes, en s’occupant de tout et de tout le monde, sauf de soi ?
Être suivi psychologiquement est une bonne piste. Cela permet d’aller déposer régulièrement en terrain neutre, les angoisses, les questions, et d’essayer de comprendre ce qui nous arrive. Mais ne s’occuper que du mental ne suffit pas. Même si la première démarche psychologique me semble très importante voire indispensable, il n’en reste pas moins que nous sommes un tout (physique, mental, émotions) et qu’il est donc essentiel d’aborder notre être dans sa globalité.
La sophrologie, une alliée de choix !
Rien ne vous étonnera donc, si je vous parle de sophrologie ! Afin, non pas de se refermer sur soi, mais au contraire, de s’ouvrir à soi. Pour ma part, j’ai eu la chance de rencontrer cette discipline à l’hôpital en tant que patiente après une 2ème rechute de cancer, en complément des suivis médicaux et psychologiques indispensables. Cela a été une révélation et m’a apporté une très grande aide.
J’y ai découvert et expérimenté l’activation de la conscience, de la présence à soi, de l’écoute intérieure, du lâcher prise, de l’accueil des sensations et fait l’expérience de la phénoménologie (ce qui se donne à voir ici et maintenant, de manière positive, sans jugement, sans interprétation), avec des techniques simples et faciles pour apprendre à s’écouter, se détendre en toutes circonstances et donc à relativiser pour moins ruminer, à apaiser des douleurs, à reprendre confiance en soi, retrouver l’estime de soi, accepter ce corps meurtri, se préparer mentalement, optimiser ses capacités et ses potentiels pour des projets futurs sur le chemin de la résilience…
J’ai pris grand plaisir à retrouver chaque semaine ma sophrologue en me laissant guider, pour me sentir au fil des rendez-vous et de la répétition des séances chez moi, de plus en plus ancrée et actrice de mes choix et de ma santé.
Cela prend du temps et c’est tant mieux car cette période est aussi l’occasion d’expérimenter un nouveau rythme de vie pour vraiment profiter de l’instant présent. Chacun y trouvera son rythme au fil des séances, en individuel ou en groupe, qui se déroulent sur le même schéma ; un temps de parole avant et après une technique adaptée au besoin exprimé ou plus global pour les groupes, pour partager (ou non) ses ressentis.
Comment garder pour moi toute seule cette expérience qui a été si révélatrice, bienfaisante et positive ?
J’ai donc décidé après une troisième rémission, de m’orienter vers une formation sérieuse en sophrologie afin d’en faire ma profession. Ainsi, j’ai suivi une formation complète en présentiel pendant 3 ans à l’ESSA, que j’ai complétée par plusieurs spécialités, afin de partager et transmettre cette nouvelle philosophie de vie qu’est cette discipline de l’être dans sa globalité, avec ses principes et ses valeurs humaines tournés vers l’écoute, la relation d’aide, l’accompagnement et l’autonomie.
Et puis il y a eu cette rencontre avec Delphine Deborde, la fondatrice de l’association Unisson-Idf ( www.unisson-idf.com ), basée à Magny le Hongre sur le Val d’Europe à côté de Disney (77). Je cherchais une association d’aide, auprès de qui je pouvais proposer des interventions en sophrologie, toujours dans le but de partager et transmettre des valeurs existentielles pour aller vers un changement de regard sur soi-même et la vie. J’ai d’emblée beaucoup aimé le concept créé par Delphine, qui consiste à proposer un lieu de rencontre, de partage et de répit avec des activités de soins de suite (art thérapie, sophrologie, yoga, gym adaptée, groupes de parole, ateliers retour à l’emploi, etc…) destinées aux personnes ayant subi un cancer ou atteintes de pathologies chroniques, mais également ouvert aux aidants familiaux malheureusement trop souvent oubliés. J’y interviens maintenant depuis plus de deux ans avec bonheur ! Ce type de structure avec une démarche d’accueil pluridisciplinaire reste malheureusement encore trop rare, mais cela évolue et c’est tant mieux ! Afin d’aider Unisson, une marche solidaire contre le cancer est d’ailleurs organisée par l’agglomération du Val d’Europe, le dimanche 29 mars 2020 au parc du château de Chessy. Bulletin d’inscription sur www.valdeuropeagglo.fr
Quelle que soit l’épreuve de santé ou de vie par laquelle on passe ou l’on est passé, nous n’en sortons pas indemne. Chacun fait comme il peut avec son expérience, son histoire, son caractère et son envie… Viendront ensuite le temps l’action et celui de la résilience, à un rythme propre à chacun.
Décider de devenir acteur de sa vie et donc de sa santé, c’est aussi peut-être accepter l’aide et l’accompagnement de professionnels certifiés. Après le temps de l’ouverture de conscience, de l’apprentissage et de l’expérience vécue, viendra (à chacun son rythme) le temps de l’autonomie pour un mieux-être harmonieux et durable.
L’accompagnement sophrologique dans le cadre de la relation d’aide d’une personne soignée ou l’ayant été pour un cancer (ou toute autre pathologie), s’inscrit donc pour le sophrologue dans une démarche d’écoute active, d’accueil avec un regard positif inconditionnel et bienveillant. Cet espace créé invitera la personne à acueillir ce qui se laisse à voir en elle, ici et maintenant, sans analyse, sans jugement, à prendre conscience de son schéma corporel comme réalité vécue, de ses ressentis, de ses besoins essentiels, au travers de sa tridimentionnalité (le corps dans la temporalité : présent, passé, futur), dans sa nouvelle réalité objective et dans une dynamique d’action positive. Cela lui permettra ainsi d’envisager un changement de regard sur elle-même et les choses, de laisser émerger à sa conscience ses propres capacités et ressources, son ancrage, afin d’avancer à son rythme vers l’acceptation et l’accueil des changements (ou pas…), de son état au travers de son être tout entier, ici et maintenant dans l’instant présent.
L’adaptabilité jouera aussi son importance dans ces accompagnements afin d’accueillir la personne telle qu’elle est, et avec l’impermanence de ses états, notamment les baisses d’énergie, de moral ou fatigue qui peuvent persister et qui bien souvent induisent de fait du négatif…
La sophrologie est l’éloge à la fois, de la lenteur, de l’acceptation, de l’accueil sans jugement et de l’intégration, d’un changement de regard positif, ce qui fait plutôt du bien dans ce monde TGV / zapping où tout doit aller vite, quitte à ne plus avoir le temps d’aller en profondeur… Et c’est bien dommage ! Il ne s’agit pas de ralentir pour ralentir mais plutôt d’apprendre à faire des pauses ressourçantes essentielles et énergisantes, vitales à un meilleur équilibre et donc à une meilleure santé générale.
Reprenons donc le pouvoir d’agir sur nos vies, notre santé en prenant soin de notre être tout entier (corps, esprit, émotions), reconnectons-nous à nous-mêmes en étant accompagnés et guidés par des professionnels bien formés en minimum 2 ans en présentiel pour la sophrologie, qui nous amèneront vers l’autonomie et pas la dépendance. Car, ce métier n’étant pas encore réglementé, oui, des dérives sont possibles surtout lorsqu’on est en situation de fragilité. Ce sujet est évoqué dans l’ouvrage « Médecines complémentaires et alternatives, pour ou contre ? » initié par les auteurs Véronique Suissa – psychologue, Serge Guérin – sociologue, et Philippe Denormandie – chirurgien, aux éditions Michalon, et auquel nous avons été invitées à contribuer pour la sophrologie avec mes deux collègues Anne Almqvist et Isabelle Talpain.
Chacun son chemin, chacun son rythme, en notant tout de même que plus tôt on commence, plus les bénéfices et les changements pourront s’observer et s’ancrer profondément et durablement.
Je vous souhaite d’en faire l’expérience pour redevenir acteur ou actrice de votre équilibre et votre santé et dans la mesure du possible agir en prévention.
Marie-Aude GOU
Sophrologue, praticienne pleine conscience, relation d’aide phénoménologique et Hypnose
Présidente de l’association Les Ateliers Sérénité du Val d’Europe
Présidente du pôle santé du Réseau Professionnel National des Sophrologues (RPNS)